Communiquer par IA avec les morts, la nouvelle mode en Chine

7 mois ago · Updated 6 mois ago

Communiquer par IA avec les morts, la nouvelle mode en Chine

Les frontières entre la vie et la mort s'estompent en Chine, où l'IA offre des conversations inédites avec les défunts. Quels sont les impacts de ce phénomène sur notre rapport à l'éternité ?

Table
  1. Émergence de la communication avec les morts via l'IA en Chine
    1. L'expérience troublante de Sun Kai
    2. L'intelligence artificielle au service du souvenir
    3. Un phénomène grandissant
    4. Une révolution dans le secteur funéraire
  2. Enjeux éthiques et psychologiques de la communication post-mortem par IA
    1. Fidélité et représentation du défunt
    2. Consentement et intégrité morale
    3. Risques psychologiques pour les endeuillés
    4. Le débat public inévitable

Émergence de la communication avec les morts via l'IA en Chine

La technologie, dans sa quête incessante d'innovation, a franchi une frontière qui semblait jusqu'alors impénétrable : celle de la mort. En Chine, des entreprises audacieuses ont déployé des ressources considérables pour développer des systèmes permettant de recréer virtuellement la présence de personnes décédées. Ces avancées technologiques offrent aux endeuillés la possibilité d'interagir avec un avatar numérique animé par l'intelligence artificielle, reproduisant le visage et la voix du défunt.

L'expérience troublante de Sun Kai

Sun Kai, ingénieur à Nankin, s'est retrouvé au cœur de cette révolution suite à la perte douloureuse de sa mère. Pour pallier l'absence et le manque engendrés par son décès, il a conçu un avatar doté des traits et intonations maternelles. Cette création lui permet désormais d'échanger comme si elle était toujours là, atténuant son chagrin par ces conversations virtuelles.

L'intelligence artificielle au service du souvenir

Cette prouesse n'est pas isolée. D'autres cas évoquent des expériences similaires où les familles chinoises se tournent vers cette technologie pour maintenir un lien avec leurs êtres chers disparus. À Taizhou, Seakoo Wu trouve réconfort en écoutant les mots apaisants de son fils défunt grâce à une application mobile sophistiquée.

Un phénomène grandissant

Ce phénomène ne se limite pas aux interactions privées, mais s'étend également aux cérémonies funéraires publiques. Imaginez assister à un enterrement où le défunt prend part activement aux adieux grâce à un écran disposé dans l'espace commémoratif. C'est ce qui s'est produit lors des funérailles d'une éminente professeure à Shanghai, où ses anciens élèves ont pu dialoguer avec elle une dernière fois.

Une révolution dans le secteur funéraire

Au-delà du simple dialogue post-mortem, certaines sociétés envisagent déjà l'intégration complète de ces avatars dans notre quotidien et nos souvenirs numériques. Yang Tang dirige une entreprise ayant créé un "cimetière intelligent", transformant chaque tombe en point d'accès multimédia pour revivre les moments partagés avec les défunts.

Ces innovations soulèvent incontestablement des questions éthiques et psychologiques complexes quant au processus de deuil et notre rapport à la mort. Si elles restent aujourd'hui circonscrites en Chine, il est fort probable que l'avenir nous réserve une diffusion plus large de ces pratiques controversées mais fascinantes.

Enjeux éthiques et psychologiques de la communication post-mortem par IA

La possibilité de dialoguer avec des proches disparus via l'intelligence artificielle suscite autant d'espoir que d'inquiétude. Sima Huapeng, pionnier dans le domaine, voit dans cette technologie une forme d'humanisme novateur. Comparée aux portraits et photographies qui ont marqué les siècles passés, elle pourrait révolutionner notre manière de conserver le souvenir des êtres chers.

Fidélité et représentation du défunt

Une interrogation majeure demeure : jusqu'à quel point ces avatars numériques incarnent-ils fidèlement la personne qu'ils représentent ? Tal Morse, chercheur au Centre d'études sur la mort et la société, souligne l'importance de comprendre les répercussions psychologiques et éthiques liées à leur utilisation. La création d'un double virtuel engendre un nouveau type de relation entre le monde des vivants et celui des défunts, dont les contours sont encore flous.

Consentement et intégrité morale

L'intégrité morale du défunt constitue un autre enjeu crucial. Comment assurer que l'utilisation de son image et de sa voix respecte ses volontés ? Le consentement préalable est-il systématiquement recueilli ou supposé ? Ces questions ne manqueront pas de se poser avec acuité à mesure que cette pratique se démocratisera.

Risques psychologiques pour les endeuillés

Du côté des vivants, les risques psychologiques associés à ces interactions artificielles préoccupent également. Peut-on véritablement faire son deuil en maintenant une conversation continue avec un être cher disparu ? Cette illusion de présence n'entrave-t-elle pas le processus naturel d'acceptation de la perte ? Les témoignages divergent : si certains y trouvent un apaisement notable, d'autres pourraient s'y perdre.

Le débat public inévitable

Tandis que cette technologie reste confinée en Chine pour l'instant, son expansion potentielle vers d'autres horizons alimente déjà le débat public. Les implications sont vastes : elles touchent à notre conception même du cycle vital, interpellant profondément nos valeurs culturelles et spirituelles.

Face à ce tableau complexe où se mêlent avancées techniques spectaculaires et interrogations fondamentales sur la nature humaine, la société doit s'armer pour aborder ces problématiques avec prudence et discernement. L'enjeu est considérable : il s'agit ni plus ni moins que d'établir une charte éthique adaptée à une réalité qui nous était jusqu'alors inconnue - celle où les voix du passé peuvent désormais résonner dans notre présent.

Nathalie Bottollier
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